La récession touche davantage les femmes en général, et les entrepreneures en particulier, qui sont 22 % à craindre pour la survie de leur entreprise. Quels sont les défis et les moyens identifiés pour préserver le tissu économique féminin à Laval?

D’après un sondage, deux tiers des entreprises à propriété féminine fonctionnaient à moins de 50 % de leur capacité fin avril. « Les entrepreneures sont souvent présentes dans les secteurs d’activité les plus impactés par la crise, comme le commerce, la restauration, les services », explique Mme Gasana, directrice régionale de Femmessor à Laval, une organisation dédiée au développement de l’entrepreneuriat féminin. 42 % des entrepreneures étaient alors en recherche active de financement. « Il s’agit souvent d’entreprises de plus petite taille, avec des moyens financiers limités », ajoute-t-elle. La menace d’une deuxième vague fait aujourd’hui planer l’incertitude. « Dans toute situation de crise, il y a des opportunités », affirme Mme Gasana. Quelles priorités faut-il retenir pour les saisir ?

Adapter son modèle d’affaires
Brigitte Pelletier, présidente de l’Agence Intégrale, a l’habitude de construire des plans stratégiques pour ses clients. Elle a appliqué l’exercice l’année dernière. « J’étais sur ma lancée quand la pandémie a frappé », partage la dirigeante, qui peut s’appuyer sur une vision claire, des tableaux de bord affinés et une nouvelle offre de services. Peu d’entrepreneures partagent cette chance. Caroline Arnouk, fondatrice de OPA Technologies, une start-up spécialisée dans la gestion géospatiale a vu ses projets brutalement reportés à cause de la pandémie, générant un retard d’un an sur sa croissance. Elle s’est alors concentrée sur la gestion stratégique, redéfinissant son offre afin d’inclure de nouveaux services pour les villes et proposer des formations à distance. « Il faut faire pivoter le modèle d’affaires pour s’adapter aux besoins des clients », croit Sylvie Gasana.

Prendre le virage numérique
La directrice de Femmessor Laval souligne que les besoins des consommateurs ont beaucoup changé, poussant les entreprises à prendre le virage numérique. « La clientèle étant en ligne, il a fallu vendre sur les réseaux sociaux », affirme-t-elle. Kym Bélisle, propriétaire du Centre Physi-K Inc. a suivi une formation en marketing et développé sa présence sur les médias sociaux pendant la fermeture de son gymnase. « Cela m’a permis de garder une proximité avec mes clients », affirme la jeune entrepreneure, qui a affiché complet lors de la réouverture de ses cours cet été.

Trouver du financement
Selon Mme Gasana, la plupart des entrepreneures ont pu bénéficier de liquidités sous forme de prêts, à travers les mesures gouvernementales d’urgence. « Les critères d’admissibilité ne prennent pas en compte la réalité des start-ups technologiques, qui vivent de leurs investisseurs et de projets vitrines les cinq premières années », regrette Caroline Anouk. Elle estime la situation dommageable à l’innovation, d’autant que les nouvelles commandes tardent à rentrer au Québec. « Les banques se sont montrées frileuses envers l’industrie de la construction, en particulier à l’égard des femmes à la tête de PME », souligne de son côté Josée Dufour, présidente du Groupe Axiomatech, qui recommande de s’appuyer sur les conseils des acteurs économiques locaux.

Miser sur l’humain
Pour Mme Gasana, « La crise a impacté non seulement les entreprises, mais aussi les entrepreneures, affectant leur santé mentale ». Beaucoup de femmes ont dû assumer l’essentiel des responsabilités relatives aux enfants lors de la fermeture des écoles et des garderies. Mme Pelletier constate que les entrepreneures qui peuvent compter sur un réseau fort s ’en sortent mieux que les autres. « Il faut faire davantage de maillage entre celles qui ont des idées d’innovations et celles qui ont les moyens de les financer », croit-elle. À l’automne, Femmessor organise des cellules de co-développement, et, le 27 octobre, un évènement entrepreneurial en ligne, Osez être le changement.