Installé au Québec depuis 1993, Antoun Karanta arrive chez lui lorsqu’il rentre de voyages d’affaires. Ce commerçant, fier descendant d’une talentueuse famille syrienne de couturiers, de père en fils, utilise sa connaissance des défis de l’immigration pour soutenir ses employés dans leur apprentissage du français.

Seul de la famille à avoir pu entreprendre des études secondaires, Antoun Karanta est vite devenu indispensable au sein de sa famille qui avait installé, dès son arrivée, un premier atelier de couture dans le sous-sol de sa demeure à Laval. Pendant que son père, ses frères et ses sœurs suivaient des cours au cofi et entretenaient des relations d’affaires avec la Tunisie et la Syrie, l’adolescent de 13 ans leur lisait les lettres et autre documentation en français.  « J’ai eu la chance de vivre une belle expérience en classe d’accueil. Mon apprentissage du français s’est fait rapidement. En six mois, je savais lire et écrire. Tout le monde comptait sur moi », raconte le copropriétaire des deux boutiques Ateliers Karanta, spécialisées dans le prêt-à-porter et la confection sur mesure, l’une à Laval, l’autre à Montréal.

Apprendre au contact quotidien
Alors qu’Antoun Karanta poursuivait ses études jusqu’à l’université, sa famille a appris le français au contact quotidien de la clientèle et en fréquentant les commerces du quartier. « Ils comprenaient mieux les expressions québécoises orales que les textes. Puis, lentement, ils se sont mis à apprendre l’anglais. C’était essentiel pour rester en affaires. La famille s’est adaptée à la réalité du marché », poursuit-il.

Sachant l’importance de comprendre et de s’exprimer rapidement en français pour mieux s’intégrer à la culture francophone québécoise, Antoun Karanta se fait un devoir de communiquer en français avec les employés. « En leur parlant en français, ça les familiarise avec les mots de tous les jours. C’est uniquement quand ils ne comprennent vraiment pas que je passe à l’arabe ou à l’anglais. Ma vie de tous les jours se passe en français et je veux que nos employés communiquent en français aussi entre eux, même si chaque métier possède son jargon », admet le commerçant.

Le secret : embaucher un immigrant
Pour Antoun Karanta, la meilleure façon de faciliter l’intégration d’un immigrant à la communauté québécoise francophone est de lui fournir du travail. Un travail en fonction de ses qualifications.

C’est un conseil qu’il donne à tous les entrepreneurs de Laval.

« Depuis mon arrivée ici il y a 25 ans, je pense que c’est un immense avantage de savoir bien maîtriser trois langues. Je peux comprendre le français sur le terrain et je peux accompagner des immigrants dans leur cheminement. Nous avons une main-d’œuvre très qualifiée. Il ne faut pas avoir peur d’embaucher un immigrant. Au Québec, la langue d’usage est le français. Je ne me suis jamais senti écartelé entre ma langue maternelle et celle de mon pays d’accueil. Je n’ai jamais eu de difficulté à la défendre auprès de nos employés. Plus on communique bien en français, moins il y a d’expériences racistes. Je n’en ai vécu qu’une seule en 25 ans. Pour moi, c’est une motivation », conclut Antoun Karanta.